S4E6. 'Fritland'. Frites belges à la sauce albanaise
Interview avec Zenel Laci, auteur de la pièce jouée au Théâtre de Poche sur la friterie la plus célèbre de Bruxelles. Histoire d'une famille de migrants, de rachat personnel, de patriarcat et liberté
Bonjour,
bienvenu.e chez BarBalkans, la lettre d’information aux confins nuancés.
Une devanture rouge et blanche, le crépitement des pommes de terre plongées dans l’huile bouillante, ainsi que l’odeur de la friture enveloppent tous ceux qui s’approchent d’un commerce très singulier : Fritland. Le pays des frites.
Si la Belgique est le royaume des frites, Bruxelles en est la reine incontestée. Cependant, cette devanture rouge et blanche au cœur de la capitale belge cache une histoire unique.
Selon les Bruxellois, Fritland est la meilleure friterie de la ville. Cependant, le plus belge des commerces belges a été fondé il y a 45 ans - et il est toujours géré - par une famille non belge.
L’histoire de Fritland commence en Albanie, avec une fuite et un exil, avec un père qui rêvait des États-Unis. Puis, l’arrivée en Belgique et l’ouverture d’une friterie, avec le travail de toute une famille, y compris des enfants.
Et avec l’un des fils qui, après de nombreuses années au sein d’une structure rigidement patriarcale, trouve le courage de dire non et de commencer sa propre vie. En dehors de Fritland, enfin en Belgique.
Aujourd’hui, Fritland n’est plus seulement une friterie, c’est aussi une pièce de théâtre jouée à Bruxelles. Fritland, de et par Zenel Laci. Ce fils issu d’une famille de migrants albanais qui a quitté l’Albanie pour la Belgique pour se retrouver lui-même.
Aujourd'hui, après le succès au Théâtre de Poche, il a décidé de raconter à BarBalkans l’histoire de sa famille et de Fritland.
Son histoire.
L’Albanie à Bruxelles
Quand et comment une famille albanaise s’est-elle installée en Belgique et a-t-elle créé l’un des commerces le plus typiquement belge ?
« En 1952, quand mon grand-père a quitté l’Albanie, il était royaliste et membre de l’Armée du Roi Ahmet Zog. Il voulait continuer à défendre la démocratie, mais un jour, on l’a prévenu que les communistes étaient sur la route pour l’arrêter. Il n’avait qu’un jour pour se préparer et fuir avec sa famille.
Il voulait simplement se sauver, tandis que mon père voulait aller aux États-Unis. Il avait 16 ans. Il est resté 3 ans au Kosovo et s’y est marié. Après avoir passé 8 ans dans des camps de réfugiés en Croatie et en Slovénie d’abord, selon les indications de la Croix-Rouge Internationale, il fallait partir de la Yougoslavie en Italie pour émigrer aux États-Unis. Mais le visa pour les États-Unis leur a été refusé en 1962.
À l’époque, la Belgique offrait l’enseignement gratuit pour les enfants, un logement et du travail pour les parents. Ma famille est arrivé en Belgique en 1963 : mes parents et mes grands-parents étaient nés en Albanie, mes deux grandes sœurs au Kosovo, mon grand frère en Italie, moi et mon autre frère en Belgique. Voilà le parcours !
Mon père avait toujours ce rêve de partir aux États-Unis, même quand il était en Belgique. Un heureux hasard a fait qu’un Portugais installé à Bruxelles lui a proposé de lui vendre sa friterie : s’il voulait faire de l’argent rapidement, c’était le meilleur moyen d’y arrivé grâce à ce commerce. Le patates coûtaient pas cher, contrairement à la main d'œuvre. “ Il nous a tous mis au travail indépendamment de l’âge ”.
C’était en 1978. Mon père avait vu qu’il y avait un Pizzaland près de la Bourse, le pays des pizzas. C’est pour ça qu’il a pensé : “ Comme nous faisons des frites, on va l’appeler Fritland ! ”
Il m’a retiré de l’école et m’a mis au boulot pour peler les patates. À l’époque, c’était normal, parce qu’il fallait se sortir de la pauvreté. J’ai commencé à travailler au comptoir à 16 ans.
La friterie a commencé à avoir du succès et ça a été une chance incroyable pour des gens comme nous qui ne savions pas du tout ce que c’était que les frites. Depuis, le commerce est toujours tenu par la famille ».
Quelle était la relation de votre famille en Belgique avec l’Albanie ?
« Comme mes parents ont été exilés, plus jamais on a eu de contact avec Albanie pendant 40 ans. Quand quelqu’un ne peut pas retourner dans son pays, on mythifie tout : c’est le plus beau pays du monde, c’est magnifique. On est nourri de ça, sans aucune image réelle. Et on ne se pose aucune question.
Par exemple à l'école primaire les professeurs ne comprenaient pas de quelle nationalité j’étais: Albanais ? Libanais ? C’est où l’Albanie ? À côté de la Grèce il n’y a que la Yougoslavie, non ? L’Albanie s’était retiré de tous les Pactes, elle existait en autarcie, n’était pratiquement jamais nommée.
Je viens d’une famille qui ne lisait pas. Un jour, à la friterie un client nous a entendu parler en albanais. Et, il m’a fait découvrir Ismail Kadare et son roman, Le Général de l’Armée morte que je ne connaissais pas. Ce client m’a fait comprendre qu’il existait des écrivains albanais traduits et publiés à l’étranger… je me suis rendu compte qu’on n’est pas que des mécaniciens ou des chauffeurs de bus ».
Il y avait beaucoup de traditionalisme au sein de votre foyer, alors que l’activité professionnelle est très ‘belge’. Ce n’est pas une contradiction ?
« C’est une contradiction forte. Mais c’était comme ça : à la maison c’était l'Albanie, a l’extérieur, c’était la Belgique. Et même si la friterie vendait un produit ‘belge’, on était en Albanie. Nous étions des albanais qui vendaient des produits belges.
Mon père disait : « Tu es Albanais, tu resteras Albanais ». C’était ça la contradiction : un père gardien de la culture albanaise et nous les enfants qui voulions nous émanciper grâce à cette friterie. Tous les clients qui passaient chez nous du matin au soir étaient libres. J’ai mis du temps pour le comprendre. Pour mon père, la friterie était juste un moyen de faire un maximum d’argent le plus rapidement possible pour nous emmener aux États-Unis.
A cette époque on vivaient séparé des Belges, Fritland était l’un des seuls commerces tenu par des Albanais à Bruxelles. Et donc, mon père nous a toujours dit de donner à manger gratuitement à n’importe quel Albanais qui était dans le besoin. Et pareil, pour les Belges les plus démunis, tels que les sans-abri du centre-ville.
La friterie était devenue un endroit où beaucoup de gens pouvaient trouver un réconfort. C’était pareil, par exemple pour les ambassadeurs d’Albanie à Bruxelles – quand le pays s’est ouvert au monde – ils étaient payés en lek (la monnaie albanaise). Ils n’avaient donc pas beaucoup de moyens pour vivre à Bruxelles. C’est comme ça que j’ai eu la chance de rencontrer beaucoup d’intellectuels albanais ».
A l’intérieur et à l’extérieur de la friterie
Comment s’est-elle déroulée votre intégration à Bruxelles en tant que fils d’immigrés albanais ?
« Moi, je suis né en 1966 et quand je suis allé à l’école primaire, la Belgique n’avait rien prévus pour nous. Les Belges ont accepté la génération des parents qui étaient des travailleurs immigrés, de la mains-d’œuvre, mais ils n’avaient pas anticipé que nous avions aussi des têtes bien faites. Il y a eu un genre de vide pour les enfants issus de la deuxième génération d’immigrés comme moi qui étaient là dans les années 1970.
Je me rappelle très bien qu’en classe on mettait les Belges devant et le reste du monde derrière : les Turcs, les Portugais, les Marocains, les Grecs, les Hongrois, les Albanais. Les professeurs communiquaient d’une certaine manière avec les Belges, et ils étaient extrêmement sévères avec nous.
Un jour un professeur m’a donné une énorme gifle parce j’avais bégayé en disant un poème. Un autre enfant a été frappé violement par quatre professeurs, parce qu’il avait modifié une note dans son bulletin. Nous étions une génération juste tolérée à l’école ».
Et qu’a représenté Fritland pour vous en grandissant ?
« Comme j’étais le plus jeune à travailler, ça a été un enfer pour moi. Jusqu’aux années 1990, il y avait peu de Bruxellois qui voulait vivre dans le centre-ville. C’était extrêmement violent à l’époque. Il fallait se battre tous les jours pour protéger la caisse et défendre le comptoir.
En particulier pour moi, qui était plutôt timide, introverti, rêveur et intéressé par les livres et rien d’autre. Mais je n’avais pas le choix. J’ai mis beaucoup de temps à comprendre que je n’étais pas à ma place dans cette friterie.
Dans ma famille, personne n’a jamais osé dire non à mon père, car l’histoire vécue de mon père avait été mythifiés par son exil. Je suppose que ça vaut pour toutes les familles albanaises qui ont connu l’exil, en particulier celles qui ont vu mourrir des membres de leur famille pendant leur fuite. Qui étions-nous - nous les enfants nés en Belgique, avec un travail et un toit – pour dire non à quoi que ce soit ?
Je suis le premier qui ai dit “ non, je ne peux plus être loyal ”. En réalité, la question était celle de la loyauté chez les Albanais : la seule solution pour me sauver était de partir. À 30 ans, j’ai quitté la friterie et j’ai gagné ma liberté en faisant une croix sur ma famille, mais en défendant mes frères. Ce n’est pas parce que le père a souffert que nous devons souffrir aussi ».
Quel était votre moment le plus difficile au sein de Fritland ?
« Le match de football Juventus-Liverpool au Stade du Heysel en 1985. À Bruxelles on ne connaissait pas encore le mouvement des hooligan : la ville et la police n’étaient pas préparées à recevoir ces hooligans.
Ce jour-là, j’étais tout seul au travail. La veille du match, il y avait déjà eu des bagarres avec les supporters anglais. Et le jour du match, des milliers de hooligans ont débarqué et ça a été un enfer.
Étant seul dans la friterie, j’ai eu beaucoup de mal à servir tous ces hooligans qui tentaient de voler tout ce qui se trouvait à leur portée sur le comptoir. J’ai dû me défendre en utilisant un couteau, sinon c’était moi qui allais mourir. J’avais 18 ans à l’époque, je suis devenu complètement fou. Ça a été un traumatisme.
Après le drame, la police a décidé de fermer tous les commerces du centre-ville. Mais mon père a dit : « Jamais de la vie, il n’y a aucune loi qui dit qu’il faut fermer ». Fritland a été le seul commerce qui est resté ouvert. Mon père a décidé de défendre la Belgique, car il pensait que la police n’était pas capable de le faire ».
Et quel a été le meilleur moment ?
« Il y en a eu deux. Dans la friterie un sans-abri m’avait vu en train de lire, et un jour il est arrivé avec deux livres : L’œil et l’esprit de Merleau-Ponty et L’existentialisme est un humanisme de Sartre. Joseph était un professeur de français à la retraite, qui avait vécu un drame dans sa vie.
Nous sommes devenus amis et il m’a fait comprendre ce qu’était réellement la littérature à travers différents courants littéraires tels que l’existentialisme et l'humanisme. C’est lui qui a lu mon premier texte, et il m’a donné confiance en moi.
Le deuxième moment marquant a été lorsque j’écrivais de petits poèmes pour raconter l’histoire des clients sur les papiers avec lesquels on emballait les cornets de frites.
Un jour j’ai pris un de ces papiers avec un poème, je l’ai mis autour du cornet et j’ai mis les frites dedans, et je l’ai tendu à un client, comme on jette une bouteille à la mer. Une heure plus tard le monsieur est revenu. Il m’a dit : C’est vous qui avez écrit ça ? “ C’est magnifique, je suis revenu juste pour vous dire qu’il faut continuer ! ” »
Le rideau s’ouvre
Qu’est-ce qu’il s’est passé après votre départ de Fritland ?
« Quand je suis parti, pendant trois ans, je ne savais pas ce qu’était ma vie. Je voulais aller à l'université et suivre des cours de littérature et de langue française. Je voulais devenir professeur de français. Mais comme mon père m’avait retiré de l’école à l’âge de 14 ans, je n’avais pas de diplôme pour suivre l’enseignement supérieure.
Je me suis inscrit comme étudiant libre à l’Université de Bruxelles, mais j’ai ressenti un décalage total avec les jeunes étudiants. Ils avaient une liberté que je ne comprenais pas. Cela a créé des contradictions dans ma vie. J’ai rencontré un groupe de jeunes issus des jeunesses communiste belges qui m’ont aidé, moi qui venait d’une famille ayant fui le régime communiste.
J’ai trouvé que les idées progressistes étaient géniales, et d’ailleurs, je suis resté de gauche, le seul de ma famille à voter à gauche, mais je n’ai jamais pris la carte du parti. Ces jeunes m’ont ouvert les yeux et l’esprit sur la politique, le concept de progrès et le socialisme, qui n’avait rien à voir avec tout ce que j’avais entendu sur la structure dictatoriale socialiste en Albanie.
Cependant, je voulais absolument poursuivre des études. Sur les conseils d’un de ces jeunes, je me suis présenté aux Service d’information sur les Études et les Professions. Là, j’ai expliqué ma situation à un conseiller en expliquant que je voulais faire des études universitaires en littérature. Comme je n’avais pas de diplôme, il m’a répondu que c’était impossible. Mais comme j’étais sans emploi, il existait un cours de promotion sociale qui proposait un programme de littérature en scénographie.
Je me suis inscrit, j’avais 30 ans et déjà un enfant. J’ai travaillé dur, j’ai réussi - et j’ai terminé premier. J’avais enfin un diplôme, mais en réalité, je suis tombé amoureux du théâtre. J’ai donc commencé à écrire et à mettre en scène ».
Et pourquoi avez-vous finalement choisi de parler de Fritland ?
« Pendant des années on me demandait pourquoi je n’écrirais pas l’histoire de notre famille. Je ne me sentais pas capable de le faire, car étant le plus jeune de la famille, je n’avais pas vécu l’exil. Mais cette idée est restée dans un coin de ma tête.
Moi, je voulais écrire sur mes années passées à la friterie, en donnant la parole à Bruxelles à travers tous les clients que j’ai rencontrés en 18 ans de travail, de jour comme de nuit. À l’époque, le quartier de la Bourse et le centre-ville n’étaient pas du tout ce qu’ils sont aujourd'hui.
J’ai écrit la pièce en faisant défilés des personnages hauts en couleur que j’ai rencontrés à la friterie. J’ai utilisé le fritier comme prétexte pour donner vie à tous ces clients. C’est ainsi que j’ai commencé à écrire le spectacle et à le mettre en scène en 2017 avec le comédien Thiebault Vanden Steen.
Il m’a conseillé de faire lire le texte au directeur du Théâtre de Poche. Il est venu et m’a dit qu’il n’était pas intéressé par ce genre de spectacle. En revanche, il m’a dit : “ Tu as une perle, mais tu ne t’en rends pas compte. La perle, c’est toi ”.
Il m’a proposé d’écrire le spectacle de ma vie à Fritland et m’a promis qu’il produirait le spectacle au Théâtre de Poche à une condition : si je jouais mon propre rôle sur scène. Même si je n’étais pas comédien.
À ce moment-là, j’en ai parlé à la famille et à mes amis, et j’ai dit oui. Je voulais toujours raconter l’histoire de Fritland, mais désormais en m’inspirant de mon vécu en tant que jeune immigré d’origine albanaise qui avait des rêves et qui se trouvait dans un endroit qui n’était pas le sien. Cette friterie, qui a été à la fois une muse et une prison pour moi ».
Qu’est-ce que le spectacle a représenté pour vous ?
« J’avais 52 ans quand je l’ai fait. J’ai voulu partager une partie de la culture et de l’hospitalité albanaise. À la fin du spectacle on sert des frites, comme lorsque j’étais un jeune garçon, en hommage à mon père. Aujourd’hui tout est pardonné. Je me suis réconcilié avec ma famille et mon histoire, que je communique sur scène de la manière la plus sincère possible.
D’ailleurs, quand je pèle les patates pendant le spectacle, je parle à mon père, à mon grand-père qui ne sont plus là. Et ça me met dans l’ambiance. Même si cela a été difficile pour moi d'apprendre le métier de comédien, je suis heureux de pouvoir raconter tout cela aux spectateurs.
La première fois que nous avons présenté le spectacle devant des professionnels du théâtre, je savais que je n’étais pas bon. Le metteur en scène du spectacle, Denis Laujol, a décidé d’être présent sur scène avec moi pour m’éviter toute difficulté. Grâce à lui et à son concept scénique, nous formons un duo. Il m’a aidé à être de plus en plus libre dans mon jeu et sur scène. Il a alors convenu qu’il fallait construire une dramaturgie à deux.
Au début du spectacle Denis me présente comme si nous étions au cirque, devant un animal de foire. Mais ce qui est le plus intéressant dans la pèce, c’est que c’est moi qui me libère en m’émancipant de mon metteur en scène au fil du temps ».
Et vous avez interprété ‘Fritland’ même en albanais et au Kosovo.
« Je connais Nicolas Wieërs, le directeur de Balkan Trafik Festival, grâce à une pièce que j’avais montée sur une militante albanaise, Sevdije Ahmeti, autrice du Journal d’une femme du Kosovo sur la guerre commencé en 1998.
Chaque année Nicolas choisit une capitale des Balkans pour lancer le Balkan Trafik Festival et faire sa campagne de presse. En 2023 il a choisi le Kosovo et il m’a invité avec la pièce. Ça a été une opportunité d’aller jouer à Prishtina.
Et puis le directeur du Théâtre de Poche, qui a participé au projet, m’a dit : “ Mais alors faites-le en albanais à Bruxelles aussi ! ” C’est ainsi que le spectacle a été édité dans les deux langues, aux éditions théâtrales ‘Les Oiseaux de Nuit’. Ce qui a permis aux Albanais récemment arrivés à Bruxelles et qui ne maîtrisent pas le français, d’avoir accès à la pièce de théâtre ».
Comment votre famille a-t-elle réagi à la pièce ?
« Quand j’ai quitté Fritland, je n’ai pas vu ma famille pendant trois ans. J’avais besoin de me reconstruire, de comprendre qui j’étais et ce que la Belgique et Bruxelles représentaient pour moi. J’ai touché le fond, mais après cette épreuve, je suis remonté. J’ai dû créer des liens ailleurs, et a cette époque, j’ai éprouvé un rejet de la culture albanaise.
En 2017, quand mon grand frère a appris que j’allais écrire et jouer une pièce de théâtre sur la famille et sur l’Albanie, il était persuadé que j’allais être revanchard. Pour ma part, j’étais sûr que ça allait être cathartique pour lui et la communauté albanaise.
Le directeur nous a laissé deux ans pour écrire, créer et mettre en scène la pièce. En 2019, lors de la première représentation, toute ma famille était présente : mon père et ma sœur étaient décédés, mais ma mère, mes frères, ma sœur et grande partie de la communauté albanaise étaient là. Ils ont tous été très touchés, car il est très rare qu’un texte qui parle de l’Albanie et de l'albanéité soit joué dans un théâtre de renom.
Tous ont ri et pleuré. La communauté albanaise, en particulier celle de mes parents qui était très patriarcale, soumise à des codes archaïque et qui ont toujours eu des difficultés à exprimer leurs mondes intérieurs. Cela relève de la fierté. En réalité, cela a été vraiment cathartique. Ma mère, m’a dit : “ J’ai tout vu, j’ai tout entendu, bravo ! ” Et mon frère lui a dit : “ Ça va, j’ai compris ” ».
Arrêt au BarBalkans
Nous sommes arrivés à la fin de cette étape de notre voyage.
Aujourd’hui le comptoir de BarBalkans rencontre Fritland d’une manière très spéciale avec Zenel Laci :
« Le spectacle a été un grand succès. Avec Denis, nous servons des frites pour tout le monde à la fin de chaque spectacle. Un jour, le directeur m’a dit : “ Pourquoi n’y a -t-il pas de sauce albanaise pour les frites ? ” Moi, je pensais qu’il plaisantait. Mais l’année suivante, il me l’a redemandé : “ Où est la sauce albanaise ? ”
Alors, avec ma fille Aurore, qui nous aide à servir les frites à la fin de chaque spectacle, nous avons crée la sauce pour le Théâtre de Poche, et cela a été un succès. Maintenant, nous allons breveté la ‘sauce albanaise’ et nous allons commencer à la vendre à Fritland pour voir si ça va marcher ! »
Le voyage de BarBalkans reprend. Le rendez-vous est dans quinze jours, pour la septième étape de cette saison.
Bon chemin !
Votre soutien est essentiel pour réaliser ce projet et pour maintenir la lettre d’information BarBalkans gratuite et accessible à tous.
Un projet indépendant comme celui-ci ne peut survivre sans le soutien de ses lecteurs et lectrices. C’est pour ça je vous demande de prendre en considération la possibilité d’un support :
Le deuxième mercredis du chaque mois vous recevrez un article-podcast sur les guerres en ex-Yougoslavie, qui revient sur ce qui s’est passé dans les Balkans - ce même mois - il y a 30 ans.
Vous pouvez écouter en aperçu BarBalkans - Podcast chaque mois sur Spreaker et Spotify (en anglais et en italien).